Réflexions sur deux cartes postales (Extrait de
la revue "En ce temps-là" 1998)
par Pierre Berthier (Grenoble)
Il vous est sûrement arrivé, en remuant quelques vieux papiers ou des cartes postales, d’en retrouver quelques unes qui ont stoppé
net votre
activité de rangement, au point que vous n’avez plus vu passer l’heure.
Par hasard, j’ai retrouvé deux cartes postales du hameau de La Place. L’une en noir et blanc, difficile à dater avec précision
(1900 environ.). L’autre,
couleur sépia, date de 1930.
Dans la première moitié du siècle, pour fabriquer des cartes postales, des photographes ambulants passaient une ou deux fois l’an,
et claironnaient
leur arrivée pour attirer les habitants des hameaux et réaliser des photos de groupes avec parents, petits enfants, vieilles grand-mères, voisins et
voisines. Ils éternisaient les souvenirs, à l’époque où les appareils photos personnels n’étaient pas encore répandus. Avec le matériel dont ils
disposaient, ces artistes ambulants se montraient en général fort habiles. Nombre de leurs photos sont aujourd’hui recherchées par des collectionneurs…
Sur mes deux cartes de La Place, séparées dans le temps par un quart de siècle, le hameau est pris sous le même angle, du sud au
nord. À part la
végétation, peu de changement, sauf un, à peine apparent, mais de grande importance pour le pays : quelques poteaux électriques figurent en effet sur
la carte de 1930.
Cette différence entraîne des réflexions.
Un bonheur tranquille
Sur la carte la plus ancienne, toutes les dames portent des cotillons longs et toutes sont coiffées d’un chignon central au-dessus de rouleaux
circulaires, ce qui est alors à la mode. Il se dégage de ce témoignage du début du siècle une impression de paix, de repos, d’un certain bonheur calme,
assoupi.
C’était hier, et c’est loin déjà… Je m’en rapporte dans les propos qui suivent aux descriptions que des grands-parents
et des proches m'ont
données.
“ Alors on ne connaissait ni automobile, ni poste de radio, ni téléviseur. Les jours s’écoulaient sans stress en l’absence
du désir de vitesse à tout
prix. Le vendredi, un journal régional apportait des nouvelles locales avec des “ scoops ” du reste du monde valables, très largement valables pour une
semaine… On n’envisageait pas de voir de près le sol lunaire et ses cailloux. Mais on se recevait à la veillée pour partager les châtaignes ou les
crêpes. ”
Souvent aussi (et cela, je l’ai vécu), dans les mois d’été, à la fin de la journée de travail, les voisins et les
voisines proches de ce qui est maintenant
la Maison des Anciens (au premier plan à droite de notre illustration de la page précédente) se retrouvaient, parfois dans la cour du Claude et de la
Césarine, parfois au bord de la route. Chacun, chacune, amenait son assiette de soupe ou son bol de lait froid et de pain trempé. On mangeait
simplement ensemble, on bavardait, on riait ensemble. On regardait passer les charrettes de foin, se lever les nuages de chaleur à l’ouest sur les monts
de la Madeleine, nuages précurseurs des orages et du feu du ciel qui incendiait les maisons et que l’on craignait tant.
La souffrance des lavandières
Image d’un passé suranné, évanescent. Attention, il ne faut pas trop rêver. D’autres propos reviennent. Les semaines
de travail n’étaient pas de
trente-cinq heures, et le chômage existait aussi, endémique à certaines saisons. La tuberculose sévissait dans bien des familles. Les hivers étaient
froids et la neige abondante, qui donnait des gerçures. Dans quelques maisons, la cuisine était réchauffée par l’étable, pour compléter l’âtre à sciure.
Alors que j’étais petit garçon, je garde le souvenir de la dame, plus toute jeune, dont on poussait la brouette pleine de linge à
rincer, jusqu’à la serve
sur le chemin de Carthelier. L’hiver, il fallait casser la glace, et le battoir qu’elle maniait vigoureusement n’empêchait pas ses pauvres mains d’être
bleuies et rongées par le froid.
En fin de compte, n’est-ce pas, la machine à laver a bien des avantages.
L’étincelle du progrès
Ce qui m’amène à la carte postale de 1930. À Coublanc, l’acceptation de l’électricité a entraîné
de graves et sérieux conflits qui n’ont pris fin
qu’après l’élection d’un nouveau conseil municipal avec deux ardents partisans d’une implantation immédiate. L’action vigoureuse de ces deux
compères artisans, Rémy Joly, tailleur et maire, et Victor Thévenet, son ami menuisier, et conseiller municipal, a permis au pays d’être électrifié avant
des communes limitrophes. De là, l’essor du tissage à Coublanc, et jusqu’à ce que les métiers disparaissent, une vitalité pendant près de cinquante ans.
Les trois petites filles de la photo, maintenant septuagénaires, ont pu faire leur vie au pays en travaillant dans le tissage chez elles ou à l’usine de la
Place.
Voilà les réflexions nostalgiques et contradictoires que la découverte, par hasard, de ces deux cartes postales anciennes m’ont
inspirées.
Suite >>>>>
FLASHBACK à LA PLACE
Le reproche a été fait par quelques internautes de trop axer les articles du site sur la passé de Coublanc, (alors que ce site a été crée justement dans ce but), et de
ne pas suffisamment parler du présent.
Aujourd'hui, nous allons pouvoir réconcilier présent et passé !
Ayant relevé la dangerosité de la présence de la ligne moyenne tension (20 000 volts) alimentant alimentant le secteur de la place, une partie de La Raterie, du
Plat et le château d’eau, en cas d'intervention des Sapeurs pompiers, le Conseil municipal a décidé l'enfouissement de cette ligne, et par là-même, la suppression
d'un certain nombre de pylônes (disgracieux).
Et miraculeusement, La Place a retrouvé, 80 ans plus tard, l'aspect que les plus anciens du village ont connu.
Un retour aux sources en quelque somme !
Avant de regarder photos et vidéos des travaux d'enlèvement, prenez le temps de lire l'article ci-dessous, mis en ligne depuis plusieurs années déjà.
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